Il y a 70 ans : le 20 août 1955 dans le Nord-Constantinois

Le 20/09/2025

Le 20 août 1955 est un moment dramatique de la guerre d’Algérie, peu évoqué par les historiens et par la presse, à l’inverse du 8 mai 1945 de Sétif auquel il peut être comparé.

4 1
Le chef du FLN du Nord-Constantinois, Youcef Zighoud, musulman intégriste, constatant que le peuple ne se mobilise pas, veut « sauver la révolution ».
Il prépare une opération pour compromettre la population musulmane, récupérer des armes et du matériel, punir « les traîtres » c’est-à-dire les musulmans francophiles, s’attaquer aux « colons » et aux bâtiments officiels.
Des émissaires parcourent le bled pour enrôler les civils et rassembler des armes.

Le jour n’est pas choisi par hasard : le 20 août 1955 est le 1er jour de l’an 1375 de l’Hégire.
À midi, le Djihad est annoncé depuis le minaret des mosquées.
Dans les localités, des hommes armés encadrent des civils lancés à l’assaut des Européens.
Ces attaques sont contenues par les forces de l’ordre venues au secours des assaillis.

Des massacres ont lieu : à la mine d’El Halia, 37 Français dont 10 enfants (certains de moins de 3 ans) et des femmes sont égorgés.
Ce drame fait la une de la presse et est exploité par le service d’action psychologique de l’armée française au point d’occulter les autres massacres.
À Aïn Abid, 9 Européens sont massacrés dont un vieillard hémiplégique et un bébé de quelques jours.
À Saint-Charles, il y a 13 morts dont 3 enfants.

Philippeville est envahie par des insurgés qui se heurtent aux forces de l’ordre.
14 militaires et policiers sont tués et l’on compte 8 morts et 11 blessés européens.
On relève 134 morts et 700 arrestations parmi les rebelles.
Au total, 47 localités connaissent des troubles.

Le bilan humain s’établit à 119 morts européens, 48 membres des forces de l’ordre et 42 musulmans francophiles.
Chez les assaillants, les pertes sont évaluées à plus de 1 000 morts et plusieurs centaines de blessés.
L’Algérie affirme qu’il y a eu 12 000 morts : ce chiffre ne peut être accepté.
Les responsables du FLN ont affirmé qu’ils donneraient les identités de toutes ces victimes. 70 ans plus tard, elles ne sont toujours pas connues…

Jacques Soustelle, gouverneur général socialiste, bouleversé par le spectacle des atrocités perpétrées sur les cadavres, déclare :
« Il n’y a pas d’alternative, c’est la guerre, il faut la faire ! ».

Les négociations entamées avec les indépendantistes sont interrompues.
Ces journées constituent un tournant dans la guerre d’Algérie.
La guerre de religion, peu évoquée par les médias depuis le début de la guerre d’Algérie, prend toute sa place dans une guerre d’indépendance qui visera à éloigner du pays tous les non-musulmans.
L’historien algérien Mohammed Harbi a pu dire qu’il y avait chez nombre de responsables du FLN une volonté de « nettoyage ethnique ».

Merci à l'historien roger VETILLARD pour cet aspect méconnu de la guerre d'Algérie.