L’amnistie n'est pas l'amnésie,
De l’historien Maurice Faivre.
Revenant sur la guerre d'Algérie, le Président Hollande admet que le 19 mars marque le début des massacres.
«Le chef de l'État a d'abord tenté d'expliquer sa décision (de célébration du 19 mars) en assurant vouloir permettre de « vivre pleinement ensemble en France, en étant respectueux de toutes ces origines, de tous ces parcours, et de toutes ces douleurs ».
Enfin, l'hôte de l'Élysée a conclu son raisonnement de la manière suivante: « Quand je dis “les drames”, c'est aussi bien ce qu'il s'est passé à travers la répression, la torture, (et) ce qu'a été une somme de violences à l'égard du peuple algérien qui était colonisé (...). Mais il y a aussi des massacres qui ont eu lieu. Quand on parle du 19 mars, on sait (que) c'est la fin de la guerre d'Algérie, mais c'est aussi le début d'un certain nombre de massacres, dont les pieds noirs ou les harkis ont été victimes. Donc il faut parler de tout pour que nous puissions vivre ensemble à partir de cette reconnaissance ».
Consulter l'article sur le site de FranceCulture.fr / Consulter notre article à ce sujet paru le 31 mai 2016.
Commentaire.
Cette déclaration comprend deux erreurs historiques :
- l'Algérie n'était pas une colonie, mais comptait 3 départements français,
- le 19 mars n'est pas la fin de la guerre d'Algérie.
D'autre part, l'accent mis sur la répression, la torture et les violences subies par le peuple algérien occulte le fait que le terrorisme est à l'origine de ces violences.
Dans son livre sur "les accords d'Evian, échec de la réconciliation", c'est-à-dire du " vivre ensemble", l'historien Guy Pervillé conclut qu'en adoptant les lois d'amnistie de 1999 et 2005, les Algériens ont répété la même politique que celle de 1962, visant à faire oublier les crimes commis par les deux camps, dans les années 60 et 90.
Mais l'amnistie n'est pas l'amnésie.
Le traitement juridique du conflit franco-algérien par la condamnation des crimes commis contre l'humanité est incompatible avec les accords d'Evian qui amnistient les criminels.
La seule solution serait celle de la Commission Vérité et Réconciliation, à l'exemple de l'Afrique du Sud en 1995. Elle exigerait que les dirigeants algériens se décident à reconsidérer leur héritage historique avec esprit critique, c'est-à-dire en rejetant le terrorisme.
Maurice Faivre, historien.